Atlas de l’océan mondial

Atlas de l’océan mondial

2007

 

Comment aborder l’océan autrement que par ses facettes traditionnelles, biologiques, physiques, poétiques, photographiques, etc.

Car l’époque commande de jeter sur l’océan un regard nouveau, emprunt de questionnements et d’interrogations à l’aune des grands enjeux écologiques qui modifient notre vision du futur planétaire.

Par le prisme de la durabilité qui doit aujourd’hui s’appliquer à l’océan et celui de la responsabilité que nous avons de mettre cette politique en application au plus tôt sous peine d’hypothéquer gravement le futur de nos enfants et de leurs enfants, voici une approche écosystémique caractérisée et chiffrée de l’océan mondial, de sa réalité physique et biologique, de son importance écologique et sociétale, de sa complexité économique et environnementale au regard des enjeux planétaires à venir.

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Eduquer le grand public via les préceptes de la Blue Society

La Blue Society vise à satisfaire les besoins présents et futurs de nos sociétés dans un esprit de croissance « positive », cela en s’appuyant sur l’immense potentiel que nous offre l’Océan mondial. Ce concept est basé sur l’utilisation responsable des ressources marines, ainsi que sur le développement de technologies innovantes, génératrices de richesses et de création d’emplois. Grâce aux échanges de savoir-faire, au partage des connaissances et à l’appropriation de cette vision par les scientifiques, les entreprises, les décideurs politiques et les citoyens, des solutions et des expériences innovantes pourront être mises en œuvre. Ainsi la Blue Society contribuera-t-elle à l’émergence d’une société plus durable et plus équitable.

La Blue Society Alliance

Afin de porter la question de l’Océan sur les scènes nationale et internationale, cinq organisations ont décidé d’unir leurs compétences et leurs énergies en créant l’« Alliance pour la Blue Society» : Green Cross France et Territoire, Nausicaá, Réseau Océan Mondial, SeaOrbiter, Tara Expéditions.

Par sa force de communication, l’Alliance peut toucher chaque année des millions de personnes en France.

Fédérer les énergies pour une gestion durable des mers et des océans

Les océans sont les garants des grands équilibres naturels de notre planète. Ils sont notamment au cœur du cycle de l’eau, dont dépendent directement la vie et le bien-être de chacun.

Cependant, les eaux internationales, qui représentent 65% de la surface des océans, ne font toujours pas l’objet d’une réglementation globale, et aucun engagement international n’a été pris à ce jour pour remédier à ce problème. Les diverses formes de pollution, l’exploitation déraisonnée des ressources -qu’elles soient halieutiques, minières ou énergétiques- la destruction des habitats, les atteintes à la biodiversité et aux écosystèmes (notamment en haute mer) ainsi que les bouleversements majeurs liés aux changements climatiques ne sont pas suffisamment pris en compte. Une approche systémique, dépassant le seul encadrement de la pêche, doit être adoptée pour permettre la protection des mers et des océans et la gestion durable de leurs ressources.

« mettre la question des mers et des océans au cœur d’une démarche de développement durable qui s’appuie sur la participation de tous les acteurs et de tous les citoyens, et en particulier les jeunes »

Les constats sont connus ; il est nécessaire maintenant de proposer des solutions et d’encourager chacun à les mettre en œuvre. L’enjeu est de repenser certains modes de développement pour construire une société plus équitable et inventer un avenir.  Et cela à la fois pour les générations actuelles et futures.

Les cinq organisations de la Blue Society Alliance souhaitent unir leurs compétences et leurs énergies afin d’aider les gouvernements et les décideurs à concevoir des stratégies et à mettre en œuvre des programmes de travail et des actions concrètes.

Engager la société dans la « Blue Society » 

La valorisation du potentiel des mers et océans est une solution d’avenir pour nos sociétés si toutefois les milieux marins sont restaurés et préservés. L’exploitation pérenne des ressources de la mer façonnera de nouvelles économies, créatrices d’emplois. Cette exploitation repose sur les échanges et le partage d’expériences ainsi que sur la prise en compte des savoir-faire traditionnels. De plus, elle nécessitera des investissements importants au service de l’innovation et le développement de nouvelles technologies.

Il est nécessaire d’impulser une dynamique qui prenne en compte les dimensions économiques, sociales, écologiques et culturelles. Dorénavant, les richesses devront être créées en tenant compte des limites de la planète et être réparties de façon équitable entre tous. Les ressources de la planète devront aussi être préservées au bénéfice des générations futures. Cette nouvelle société se nomme la « Blue Society ».

Il s’agit en quelque sorte de mettre la question des mers et des océans au cœur d’une démarche de développement durable qui s’appuie sur la participation de tous les acteurs et de tous les citoyens, et en particulier les jeunes.

Les objectifs visés

L’objectif général du projet est d’informer et d’éduquer le public sur la durabilité en lien avec l’océan, en vue de l’associer à la dynamique de construction de cette Blue Society.

De façon plus opérationnelle, il s’agit :

  • de faire connaître la Blue Society notamment à travers la valorisation d’initiatives positives,
  • d’inciter le public à agir de manière « durable »,
  • et à formuler des avis et des propositions, qui pourront inspirer l’ensemble des parties prenantes et les décideurs.

La stratégie à mettre en oeuvre

Il s’agit de s’appuyer sur des initiatives positives de développement durable en lien avec l’Océan pour faire passer la notion de Blue Society auprès du grand public.

Les actions mises en œuvre permettront à la fois de sensibiliser ce public sur des aspects de la Blue Society et de le faire s’exprimer.

Les choix formulés par le public permettront de désigner les meilleures initiatives positives qui seront primées. Les avis exprimés par le public seront valorisés auprès notamment de décideurs économiques et de responsables politiques.

Ainsi, l’action éducative débouchera à la fois sur des prises de conscience, voire des changements de comportement chez les citoyens et sur des propositions d’orientations politiques.

Le projet vise une double exigence. En premier lieu, celle de favoriser le contact direct avec le public, cela afin d’encourager celui-ci à adopter des comportements ou à accomplir et soutenir des actions en faveur de la Bue Society. En second lieu, celle de toucher un public dispersé, éloigné des centres où se dérouleront des événements organisés dans le cadre du projet, via le web et les medias.

Les acteurs du projet

Ils comprennent à fois les organisateurs, les porteurs des initiatives positives et les partenaires actifs.

Les organisateurs sont les cinq fondateurs de la Blue Society Alliance : Green Cross France et Territoire, Nausicaá, Réseau Océan Mondial, SeaOrbiter, Tara Expéditions.

Les porteurs d’initiatives sont des personnes ou organismes qui conduisent des actions dans différents champs : la recherche, l’exploitation de ressources, le développement de technologies, la mise en place de nouveaux modes de production, d’organisation, de diffusion, etc.

Les partenaires actifs sont des personnes, des groupes ou des organismes qui auront un rôle clé à différentes étapes du projet. Il s’agira en particulier de porteurs d’initiatives de projets « Blue Society », d’organismes relais qui sont en contact avec le public, de classes de collégiens ou de lycéens et aussi d’ « Ambassadeurs de l’Océan ». Les organismes relais pourront être des aquariums, des centres de culture scientifique, des associations.

Biotechnologies bleues SeaOrbiter

Tous les scientifiques s’accordent à le dire : il existe dans les profondeurs océaniques un incroyable gisement de formes biologiques dont on n’a fait jusqu’à présent qu’effleurer le potentiel pour le futur de l’humanité. En effet, cet écosystème, le plus grand écosystème terrestre, demeure encore inconnu à plus de 99% et les solutions d’innovation qu’il propose sont une source importante d’espoirs et d’attentes dans de nombreux domaines notamment l’alimentation et la médecine du futur.

Ressources bio alimentaires issues du milieu marin

De fortes menaces pèsent aujourd’hui sur la pêche mondiale : épuisement des stocks de poissons, raréfaction de la ressource, sans parler de la disparition programmée de la biodiversité alimentaire marine si nous ne changeons pas nos coutumes alimentaires et donc les mécanismes de marché qui s’en suivent.

L’aquaculture, sensée représenter une solution alternative à l’épuisement des populations de poissons sauvages, incapable de mettre en place des chaînes de nourrissages adéquat ni de proposer des espèces alternatives qui ne soient pas des carnivores de haut de chaîne très gourmands en terme de transformation énergétique pour leur croissance (saumon, bar, turbot…), amplifie le phénomène d’appauvrissement des océans.

En effet les pêches accessoires – qui n’entrent pas dans le crible du marché de la consommation et de la grande distribution mais sont transformées en farines d’aquaculture quand elles ne servent pas à nourrir les élevages intensifs de poulets – sont néanmoins prélevées dans la chaîne alimentaire naturelle et participe donc à la modification des écosystèmes et à la disparition globale de ressource et de biodiversité.

« La découverte et la valorisation
des bio ressources marines au service
de solutions alimentaires et biomédicales pour le futur :
un enjeu capital au cœur de la mission SeaOrbiter »

Il est donc grand temps d’inventer de nouvelles techniques de pêche plus respectueuses de l’écosystème marin et de développer une aquaculture fondée sur des principes pouvant nourrir une population sans cesse croissante et dont la demande en protéines venues de la mer sera exponentielle dans les années à venir, l’élevage terrestre touchant à ses propres limites. Sans parler de l’accès à la ressource marine qui doit, d’une manière éthique, être garanti aux populations côtières en voie de développement.

La solution pour résoudre une partie des problèmes d’alimentation humaine de demain réside donc dans notre capacité à inventer ces nouvelles techniques d’élevage marin durable et responsable (Par exemple : fermes marines dérivantes utilisant le principe d’agrégation de vie qui développe le phénomène naturel de formation d’un mini écosystème de vie et d’une chaîne alimentaire associée sous un objet flottant). Ce principe sera largement développé au sein de SeaOrbiter qui constitue de par sa forme un DCP (Dispositif de concentration de poissons) géant permettant d’étudier toutes les solutions en vue d’un développement de chaînes alimentaires en pleine eau et pouvant créer naturellement les bases d’un développement de ressources en protéines marines à grande échelle.

Une autre voie réside dans l’identification de micro-organismes marins (micro-algues, cyanobactéries…) pour la fabrication en masse de protéines alimentaires (compléments nutritionnels) visant à palier les déficiences des produits alimentaires issus de la pêche.

De nombreux produits issus de l’industrie des algues entrent d’ores et déjà dans l’alimentation humaine par le biais de conservateurs, de stabilisateurs ou de gélifiants naturels. C’est notamment le cas dans le domaine des jus de fruits, des crèmes glacées ou des produits laitiers. Pour autant ces composants n’entrent pour l’instant qu’à la marge dans les industries agro-alimentaires. Il s’agit, demain, de non seulement développer des compléments alimentaires issus du domaine marin et riches en minéraux et en vitamines, mais aussi d’identifier les micro-organismes capables de servir de base à la mise en œuvre de véritables process industriels visant à la fabrication extensive de protéines issues du milieu marin.

Ces recherches pourraient aujourd’hui être soutenues par un grand groupe agro-alimentaire investi dans la recherche de solutions nutritionnelles pour le futur et désireux d’ouvrir de nouveaux territoires d’innovation dans ce domaine.

Ressources bio médicales issues du milieu marin

D’autre part, les micro-organismes marins, qui comprennent plus largement virus, bactéries, cyanobactéries, métazoaires… dont une grande partie vit sous des conditions écologiques extrêmes (organismes extrémophiles), constituent de l’avis des spécialistes un réservoir difficilement quantifiable mais supposé formidable de substances actives, de métabolites, d’enzymes ou d’autre matériel génétique source de solutions potentielles dans les domaines de la pharmacologie, de la santé et de la médecine de demain.

Ce réservoir d’organismes qui demeure à analyser et à échantillonner de manière systématique, estimé de 10 à 100 milliards d’organismes et qui constitue 98% de la biosphère marine, est en outre caractérisé par une extrême rapidité de reproduction et une complexité biologique telles que l’on considère qu’il s’agit là d’un extraordinaire « cyclotron » naturel favorisant un taux élevé d’évolution, de sélection et de mutations qui engendrent à leur tour une incroyable diversité génétique elle-même source de promesses de solutions d’avenir pour les domaines précités – comme d’ailleurs plus largement pour le domaine des biotechnologies marines (associées au domaine de la chimie, de l’énergie, des nanotechnologies…), ces organismes ayant pour certains des capacités à transformer la matière de manière totalement unique et sur des très grandes échelles.

Les espoirs sont ainsi nombreux pour les instituts de recherche et laboratoires privés investis dans une course aux nouveaux protocoles médicaux, aux nouveaux médicaments, aux nouvelles molécules actives. N’oublions pas que l’AZT traitant le Sida et certaines molécules actuellement utilisées dans la recherche pour le traitement de certains cancers sont déjà issues du domaine marin. Les espoirs sont donc nombreux dans ce domaine et ont conduit de multiples organismes à investir sur des investigations des grands fonds et de la collecte systématique d’espèces phytoplanctoniques.

C’est dans cette même logique que le fameux Venter Institute s’est lancé dans une course effrénée dans le séquençage génomique systématique du milieu naturel en général, du milieu marin en particulier, ce milieu – et notamment les plaines abyssales qui constituent le plus grand écosystème terrestre – étant encore inconnu sur les plans biologique, écologique et génétique à plus de 90%.

Le séquençage de molécules marines au sens large est donc l’un des enjeux majeurs des années à venir et la biogénomie marine, notamment profonde, un secteur de recherche en pleine évolution et dont on ne mesure aujourd’hui qu’à peine les enjeux scientifiques et financiers. Sans parler de l’aspect sociétal futur que le milieu marin permettra de faire évoluer vers plus d’innovations industrielles, biotechnologiques, biomédicales pour le bénéfice des générations à venir.

C’est pourquoi, au sein du programme SeaOrbiter, nous croyons fermement à ces enjeux pour demain et avons initié une démarche réflective et collaborative avec l’Institut Pasteur afin d’engager la sphère de recherche biomédicale comme les utilisateurs des milieux pharmaceutiques et hospitaliers dans la voie de ce secteur d’innovation.

Cet accompagnement de l’Institut Pasteur doit déboucher dans les prochains mois sur un véritable consortium de recherche permettant de rassembler chercheurs et utilisateurs du monde entier autour de ce nouveau territoire d’investigation.

Là encore, l’intégration d’un partenaire privé doit permettre de soutenir, de développer et de structurer cette stratégie où chacun des partenaires investis pourra légitimement retrouver le bénéfice de son engagement.

Au-delà des molécules, des protocoles innovants

De par sa capacité à proposer une plateforme de vie isolée en mer, SeaOrbiter offre aussi des possibilités uniques pour tester un certain nombre de protocoles médicaux innovants dans le domaine de la télé médecine, télé chirurgie dont les applications s’adressent à des populations isolées. Ces domaines de recherche spécifiques développés en grande partie avec le concours des agences spatiales passent aussi par l’utilisation et le développement de TIC et d’applications notamment dédiées au diagnostic dont les développements touchent directement les pays en voie de développement. Enfin l’utilisation d’un laboratoire hyperbare permettrait aussi de tester des protocoles cliniques pendant des périodes étendues qui permettraient de suivre l’évolution et l’effet de certains médicaments. Peut-être même de développer de nouveaux protocoles

Innovation SeaOrbiter

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Jacques Rougerie : Habiter la mer

Depuis plus de trente ans, il réalise et expérimente des maisons sous-marines et des vaisseaux futuristes. Et rêve que l’humanité renoue avec ses origines. Architecte du monde sous-marin, il se considère plus comme un poète de l’océan qui, en ce début du XXIe siècle, n’a renoncé à aucun de ses rêves. On le dit Jules Verne des temps modernes, mais il s’attache à  prouver, à l’image de son héros, qu’il se nourrit aux mêmes sources de l’aventure humaine et que c’est bien l’océan qui guide son souffle créatif.

Voyageur impénitent de l’imaginaire du grand écrivain visionnaire français il puise auprès de lui sa ferveur et sa foi en l’avenir à tel point qu’il en a adopté la maxime : « Tout ce qu’un homme peut imaginer, d’autres hommes sont capables de la réaliser ».

Il conçois et réalise ainsi depuis plus de trente ans des projets d’architecture marine originaux. Passionné par la bionique marine – la transformation des formes vivantes en formes construites, il s’en inspire pour construire des vaisseaux et des habitats qui apprennent à mieux vivre la mer et à mieux la comprendre. « Habiter la mer correspond à un désir profond chez l’homme, désir qui se place au niveau des grandes pulsions qui l’ont toujours guidé au cours de son évolution. »

Sensibilisé à la préservation de l’espace naturel, il est guidé par l’idée d’une nouvelle civilisation d’hommes intégrés au milieu subaquatique, les mériens, qui créeront leur propre mode de vie pour permettre de préserver les équilibres biologiques océaniques. Ainsi, il devient primordial pour l’architecte de conserver une osmose parfaite entre le milieu, la structure et l’homme qui devra y séjourner. Car le développement des maisons sous-marines ne passe pas uniquement par la résolution technologique du défi imposé par le milieu subaquatique. Il s’agit de créer un espace de qualité de vie où le comportement humain puisse s’épanouir. En ce qui concerne les lignes de force de son architecture, elles s’appuient la plupart du temps sur la parfaite image d’adaptation au milieu qu’offrent la flore et la faune sous-marines.

« Deux grandes aventures, les conquêtes spatiales et océaniques, ouvrent les perspectives pluridimensionnelles de notre futur. De part et d’autre du miroir, les pionniers des espaces céleste et sous-marin partagent finalement des rêves symétriques »

Entre le premier projet du « Village sous la mer » aux Iles Vierges (USA, 1973), conçu pour vivre et travailler sous la mer, et « Galathée », sa première maison sous-marine réalisée en 1977, il a souhaité développer avec force et conviction sa philosophie « d’habiter la mer » à travers de nombreux projets ayant par la suite vu le jour : « Hippocampe » (habitat subaquatique), « Aquabulles » (stations d’air immergées), « Aquascopes » (semi-submersibles d’observation sous-marine), « Aqualab » (habitat-laboratoire sous-marin) et « Aquaspace » (trimaran à voile à coque centrale transparente). Il a de plus souhaité à chaque fois, aller au bout de ma démarche en séjournant dans mes propres réalisations : traversée en 1985 de l’Atlantique dans la nacelle transparente et sous-marine de l’Aquaspace, premier Noël sous la mer, en 1981, à bord d’Hippocampe avec des enfants… En outre, il a effectué de nombreux séjours dans d’autres habitats sous-marins et notamment participé, en 1992, au record du monde de 70 jours sous la mer à bord de « Chaloupa » en compagnie de Rick Presley et Yann Koblic. Il a enfin participé en 2003 et 2004, au programme Neemo de la Nasa, une expérimentation d’un habitat sous-marin simulant un module spatial et dans lequel des astronautes s’entraînent sous la mer. Toutes ces multiples expériences sont venir enrichir sa culture de l’habitat sous-marin et étayer de nombreux projets son parcours créatif. Elles sont bien entendu à l’origine de tous ses projets actuels.

L’entrée dans le troisième millénaire lui a ainsi permis de faire la synthèse de toutes ces années de recherche en créant la « Symphonie de la Terre », une sculpture jaillissant de la mer, traduisant en musique toutes les vibrations de la Terre, puis une nouvelle génération « d’Aquaspaces » et « d’Aqualabs ». Toutes ces réalisations l’ont enfin amené à bâtir son projet phare actuel, Seaorbiter, une aventure humaine à travers les océans de la planète dans l’esprit des grandes expéditions de notre temps.

Sa vision globale d’une architecture depuis toujours largement empreinte de réflexion environnementale, notamment pour ce qui est de l’empreinte que l’homme peut laisser dans le domaine maritime, lui a permis d’être sélectionné par le Prince Albert II de Monaco pour participer au grand projet d’Urbanisation en baie de Monaco que ce dernier a lancé en 2007. C’est cette même vision qui lui permet de naviguer aujourd’hui entre la Corée du sud et les Emirats Arabes Unis en passant par le Turkménistan, l’Inde ou la Turquie.

Très attaché au monde des enfants comme aux valeurs éducatives et aux outils pédagogiques, il est naturellement conscient que la société doit intégrer les bases de l’enseignement du monde marin. C’est pour cela qu’il est aussi l’architecte de centres culturels et scientifiques de la mer, terrestres ou sous-marins. C’est ainsi qu’il a réalisé des projets en France et à l’étranger, aussi bien pour des villes comme Boulogne-sur-Mer (Nausicaa), Brest (Océanopolis), Paris (lauréat du concours de l’aquarium du Trocadéro) ou Osaka, au Japon.

Grand plongeur très attaché aux valeurs éducatives et aux outils pédagogiques, il est pour l’enseignement du monde sous-marin comme élément clé de la construction des sociétés de demain.

Toujours à cheval entre les deux grandes aventures de notre temps, l’exploration spatiale et celle du monde sous-marin, il continue de participer au programme des maisons sous-marines américaines, notamment aux côtés de Bill Todd, son ami de la Nasa, responsable du programme Neemo d’entraînement des astronautes sous la mer.

Son agence a essentiellement été marquée dans ses premières années (1972 – 1981) par l’élaboration de projets spécifiquement marins et la mise en œuvre d’une nouvelle architecture capable de répondre aux défis que l’univers marin impose à l’architecte. Il y a puisé non seulement une culture et un goût pour les technologies de pointe mais aussi un savoir faire capable aujourd’hui de donner une expression architecturale spécifique et originale à chaque thématique de projet.

Très influencé par la nécessité d’intégrer toute structure humaine dans le paysage naturel et culturel environnant, son travail d’architecture se démarque aussi par sa capacité à se projeter dans un futur immédiat sans renier les alliances avec le traditionnel et le natif. Il en résulte une capacité à gérer avec autant de d’intérêt et de passion des architectures douces intégrant le bois (aménagement littoral en mer de Banda, Indonésie) que des envolées couvrantes de béton blanc et des arrondis miroirs évoquant une plate-forme de lancement spatial (Centre National de la Mer de Nausicaa, Boulogne sur mer), en passant par la fluidité métallique d’un équipement en deux ailes exprimant les technologies d’avenir (Institut francilien d’Ingénierie, Noisy-le-Grand), les lignes de métal horizontales et profilées avec effet de vitesse (usine Larousse de Formule 1, Signes), les formes bioniques arrondies signalant la fonction éducative et de connaissance des océans (Centre de la Mer Océanopolis, Brest), la corolle de verre et les structures antisismiques d’un Pavillon de  la mer et d’un aquarium nouvelle génération déroulant l’eau autour de ses visiteurs (Exposition Internationale de la mer Portopia 2000, Kobé, Japon), les superstructures haubanées et un édifice nervuré déclinant les arts et techniques de l’Air (Cité des Voiles, Gravelines), la transparence aquatique appelant la gestion planétaire de l’Eau (Cité de l’Eau, Paris) ou encore les lignes de force d’une proue de bateau mêlant passé et futur (projet de Centre de la mer de Phukhet, Thaïlande).

Aujourd’hui dans le monde des architectes, on parle résilles, doubles peaux et exosquelettes, toitures végétalisées et façades photovoltaïques, gestion de la lumière, de l’ensoleillement et des énergies renouvelables… et l’architecture simplement constructive a laissé la place à une véritable réflexion durable où le design est aujourd’hui indissociable d’un concept environnemental fort que ce soit pour bâtir des tours à énergie positive, des logements à faible consommation énergétique ou encore des musées bioénergétiques.

Tout geste architectural doit aujourd’hui nécessairement s’accompagner d’une réflexion globale poussée sur la durabilité et la responsabilité envers les générations futures. A l’heure où la compatibilité des technologies et de l’environnement se présente comme l’un des grands défis du 21e siècle, l’architecte essaye de poser comme préalable et ligne d’équilibre essentiels au travail de son équipe la nécessaire approche sociologique, environnementale et écologique de tous ses projets architecturaux. Et si les réalisations en cours (Musées, Centres de la Mer, Centres Nautiques, Aéroports) montrent une certaine diversité créatrice, son expertise et sa vocation éminemment aquatiques, tant dans les domaines culturels et pédagogiques, que dans ceux des sciences et de la technique, demeurent le fer de lance de son travail. Car c’est là sa passion.

Bien sûr il voue une réelle admiration pour le capitaine Nemo et son créateur. Mais il reste avant tout un éternel passionné de la grande aventure humaine et grâce à quelques amis, illustres explorateurs, navigateurs ou astronautes, il peut englober dans une même vision les chemins de la découverte de deux univers qui se ressemblent. « Deux grandes aventures, les conquêtes spatiales et océaniques, ouvrent les perspectives pluridimensionnelles de notre futur. De part et d’autre du miroir, les pionniers des espaces céleste et sous-marin partagent finalement des rêves symétriques… »

C’est enfin tout cela qu’il a voulu perpétuer en créant la Fondation Jacques Rougerie Génération Espace Mer au sein de l’Institut de France où il a eu l’honneur d’être élu à l’Académie des Beaux Arts. Cette fondation veut encourager, sur le plan international et de manière pérenne, l’éveil, la sensibilisation et l’action de tous, et notamment des jeunes générations, à la nécessaire préservation de l’environnement naturel. La Fondation souhaite ainsi les aider à créer et bâtir un futur plus respectueux de cet environnement qu’ils se doivent aujourd’hui d’intégrer à leur cadre de vie pour mieux le sauvegarder.

Je suis un mérien

J’aime l’océan (TedX)

« Du plus lointain que je me souvienne j’ai entendu la mer, mêlée au doux bruissement des filaos ». Cette première phrase du Chercheur d’or, ce merveilleux livre de JM Le Cléziot, je l’ai fait mienne tant elle correspond et symbolise mes propres souvenirs d’enfance. Comme son auteur d’origine mauricienne j’ai eu la chance de vivre une enfance baignée au rythme de l’océan indien, au rythme des lagons et de leurs senteurs acidulées, au rythme de l’alizé jouant dans les branches des filaos qui bordaient les plages où je jouais pendant des heures. Et de la maison où j’habitais avec mes parents sur les hauteurs de Saint-Denis de la Réunion nous dominions cet océan Indien dont l’infini bleuté se perdait dans le ciel azur. L’océan était là chaque jour à perte de vue. Un appel immuable qui a gravé au fond de ma mémoire l’empreinte de sa ligne bleutée. C’est sans doute là que tout a commencé. C’était l’époque de l’école buissonnière, des jeux dans les champs d’ananas, des aventures imaginaires. Celle du Capitaine Nemo et du Nautilus faisait bien sûr partie de mes favorites.  Comme les héros de 20000 lieues sous les mers, je rêvais que Je marchais sous la mer. J’avais transformé mon lit en sous-marin. Et j’y  vivais mille plongées épiques. Malheureusement j’ai dû quitter cet environnement paradisiaque, retour en métropole oblige.  Adieu lagons, adieu filaos. Vous imaginez le traumatisme : il m’a fallu apprendre à mettre des chaussures, à  mettre des pulls, et surtout, à ne plus voir la mer… Heureusement je fus sauvé du désespoir par une alliée de choc : la télévision. Et pas n’importe quelle télévision : la télévision en couleur. Et comme par enchantement, le monde sous-marin jaillissait à la même époque sur le petit écran grâce à un certain Cousteau. Cousteau a ainsi réveillé la mer qui sommeillait en moi et la kermesse cathodique qu’il proposait devint un rendez-vous que je ne manquais sous aucun prétexte. Et je n’ai plus vécu à cette époque qu’au rythme des aventures de la Calypso, des hommes aux bonnets rouges, des plongeurs aux combinaisons noires à bandes jaunes. Je plongeais à la rencontrer des otaries, des raies manta, des dauphins, des baleines, je pilotais la soucoupe plongeante, …  Mon lit s’était retransformé en maison sous-marine. Je voulais habiter la mer.

Si je vous raconte toutes ces anecdotes sur mon enfance c’est tout simplement parce qu’elles m’ont guidées vers ma vie d’homme.

De fil en aiguille, j’ai ainsi appris à plonger,  j’ai fait des études d’environnement marin, puis d’océanographie et de biologie marine. De milieu d’aventure la mer est devenue sujet d’étude. La plongée devenant alors mon outil de travail pour comprendre et décoder ce qui se passait sous la surface de l’océan. J’ai ainsi étudié les algues de Méditerranée, les grandes laminaires des îles Kerguelen, les poissons de l’Antarctique… j’ai même étudié les crabes à la Jamaïque…

Cependant je sentais au fond de moi que l’envie de partager, de faire découvrir l’emportait peu à peu sur l’envie de chercher. Alors j’ai troqué le microscope pour l’appareil photo et abandonné les publications scientifiques pour les magazines grand public. Et je suis devenu photographe sous-marin et journaliste spécialisé dans le milieu de la mer. Et là j’ai parcouru la planète mer dans tous les sens. Pour témoigner de son infinie beauté. Trempant mes palmes dans à peu près toutes les mers et tous les océans du globe. Et j’ai aussi fini par rencontrer mon idole : le commandant Cousteau et aller à bord de la fameuse Calypso. Et si je n’ai pas travaillé pour lui, Cousteau a eu une influence déterminante sur moi. Comme bon nombre d’enfants de ma génération –  la génération Cousteau -ayant eu cet écran bleu rivé au fond des yeux –  Cousteau a ouvert mon esprit et ma conscience sur les problèmes d’écologie, d’environnement marin.  Je ne pouvais plus simplement dire combien c’était beau sous la mer. Il fallait désormais que je dise combien c’était fragile et combien l’océan était important pour la planète.

Et une seule image suffit à résumer cela. Celle justement de notre planète océan.

Ne l’oublions pas, c’est grâce aux astronautes que nous avons pu changer notre vision par rapport à notre planète. Tout d’un coup, vu depuis l’espace notre monde était vraiment fini et il était bleu.

Mon ami Jean-François Clervoy l’astronaute – 3 fois dans l’espace – dit avec justesse que l’océan est le support vie de notre vaisseau Terre. Celui qui lui fournit son énergie et son oxygène. L’océan est donc au cœur du système planétaire, il conditionne notre vie de tous les jours étant à la fois le moteur et le poumon de la planète.

« Ne l’oublions pas, c’est grâce aux astronautes que nous avons pu changer notre vision par rapport à notre planète. Tout d’un coup, vu depuis l’espace notre monde était vraiment fini et il était bleu »

Quelques chiffres rapides. 72% de la surface de la Terre, 80% de l’écorce terrestre, 97% de toute l’eau sur terre. Les océans nous nourrissent (près de 60% des protéines que nous mangeons viennent des produits de la pêche ou de l’aquaculture), ils produisent notre oxygène (plus 60% de l’oxygène que nous respirons est produit par le plancton marin), ils régulent notre climat (ce qui nous permet d’avoir des hivers doux grâce au Gulf Stream) et soutiennent une grande partie de notre économie (plus de 90% des transits commerciaux internationaux se font par mer).

Sans parler de l’attrait qu’il exerce sur nous. Les deux-tiers de la planète vivent aujourd’hui à moins de 100 km des côtes. A l’horizon 2050 ce chiffre pourrait atteindre 75% mais nous serons alors 9 milliards. Vous imaginez la pression que nous ferons subir à l’océan.

Et c’est d’ailleurs déjà le cas. Cet environnement si essentiel pour notre survie est déjà mis à mal par l’homme. Pollutions marines – le pétrole qui vient de la mer (le dégazage des navires représentent chaque année l’équivalent de 10 marées noires majeures), le plastique qui vient de la terre (80% des macro-déchets qui flottent dans l’océan sont du plastique et vous avez entendu parler de cette mer de plastique qui se développent au cœur de Pacifique nord sur plusieurs milliers de km²), raréfaction des ressources halieutiques (80 % des grands poissons que nous consommons auraient disparu), écosystèmes côtiers fragilisés (nous avons perdu près de 20% des mangroves et des récifs coralliens lors de ces 30 dernières années).

A cela il faut hélas rajouter les effets du réchauffement climatique qui auront demain des impacts majeurs sur notre planète. Je n’en citerai que trois : augmentation du niveau de la mer qui fera disparaître les Maldives d’ici 50 ans, augmentation des phénomènes météorologiques catastrophiques de type Katrina avec toutes les conséquences économiques que cela comporte, acidification de l’océan menaçant l’intégrité du plancton et donc la production d’oxygène que nous respirons.

Alors que faut-il faire ? On ne peut pas mettre l’océan sous cloche. On ne peut pas mettre la Planète sous cloche. Ça n’a pas de sens.

Non il faut continuer à alerter, à sensibiliser à éduquer. Et à comprendre l’océan.  Il faut prolonger l’œuvre débutée par Jules Verne et prolongée par Cousteau.  J’ai coutume de dire qu’à chaque époque un visionnaire, un vaisseau symbolique, et une grande aventure sous-marine relayée par le média phare du moment.  Il y a eu 20.000 lieues sous les mers et le Nautilus. L’épopée Cousteau et la Calypso. Aujourd’hui un homme est prêt à reprendre le flambeau, véritable héritier de Jules Verne et  de Cousteau. Cet homme c’est Jacques Rougerie, un architecte visionnaire qui depuis plus de 30 ans effectue des recherches pour nous permettre de mieux observer la mer, de mieux nous la faire découvrir, pour nous faire « habiter la mer ». Et j’ai la chance de travailler avec lui sur ce qui sera la nouvelle et grande aventure sous la mer du 21ième siècle. Son vaisseau à lui s’appelle SeaOrbiter. Et je suis heureux de vous le présenter ce soir.

Alors qu’est-ce que c’est que SeaOrbiter ? C’est d’abord une nouvelle façon d’explorer l’océan. Il s’agit d’un vaisseau vertical de 58 m de haut (la hauteur de l’Arc de Triomphe), – 27 m au-dessus de la mer, 31 m en-dessous qui va dériver au cœur des océans. A son bord, et pour la première fois au monde, un  équipage de 18 personnes pourra vivre sous la mer 24h/24 et sur de très longues périodes. SeaOrbiter offrira ainsi une opportunité unique d’observer l’océan, d’affiner notre connaissance de l’écosystème marin, de ses mécanismes, de sa biodiversité grâce à une plateforme pluridisciplinaire capable d’accueillir une grande famille d’explorateurs et de scientifiques, pour une observation jour et nuit de l’inépuisable richesse des formes de vie marines, avec des accès subaquatiques permanents et faciles au monde sous-marin pour une parfaite symbiose avec l’univers aquatique. Tout ceci fait de SeaOrbiter la première maison sous-marine nomade au milieu du plus grand des jardins l’océan. Pour reprendre une analogie spatiale, SeaOrbiter sera une véritable Station Spatiale Internationale de l’espace océanique.

Il constitue en outre un outil de pédagogie et de sensibilisation unique qui pourra bénéficier des tous les nouveaux moyens de communication modernes permis par les technologies numériques d’aujourd’hui. Afin de tisser de nouveaux liens et permettre un nouveau rapport entre l’homme et l’océan.

Comment est né SeaOrbiter ? Du besoin de changer notre façon d’explorer l’océan en nous inscrivant de manière permanente dans le monde sous-marin. Car nous avons encore un énorme besoin  de connaitre, de comprendre cet océan qui nous entoure et qui reste mystérieux par bien des aspects. Malgré les années d’océanographie nous n’avons en effet  exploré que moins de 10% de l’océan, moins de 1% de ses grands fonds. ET je vous rappelle que la plaine abyssale constitue le plus grand écosystème terrestre et que l’ensemble des espèces qui y vivent se renouvèle tous les trois jours.

SeaOrbiter va donc ouvrir une nouvelle voie pour découvrir de nouvelles espèces et de nouvelles molécules. Pour comprendre les problèmes d’équilibres écologiques par exemple les relations entre océan et atmosphère notamment  dans le contexte actuel  du réchauffement climatique. Mais aussi pour trouver des solutions d’avenir dont les océans regorgent. Et cela dans de nombreux domaines. La santé et la pharmacologie (molécules actives, protéines réparatrices et résistantes produites par les bactéries extrémophiles , nouveau médicaments anticancéreux, AZT et Sida,…) , de l’alimentation (protéines alimentaire pour compléments nutritionnels, ressources alimentaires profondes, techniques d’aquaculture en pleine eau, fertilisation naturelle de l’océan par endo-upwelling…), de l’industrie (ressources minières de plus en plus accessibles, terres rares…), de l’énergie (EMR/ETM/énergie des courants, de la houle)…

Toutes ces ressources issues du domaine marin sont une source de richesses qui conditionneront demain le futur de l’humanité. Car nous ne vivons pas une crise économique je voudrais pour en persuader ce soir. Nous vivons une crise écologique dont les deux paramètres majeurs sont explosion démographique et raréfaction des ressources naturelles. Et la clé du problème se trouve en partie au cœur de l’océan. A condition de savoir l’exploiter de manière raisonnée.

Ainsi, pour le bien de nos enfants – ces fameuses générations futures dont parlait déjà Cousteau – nous devons changer notre vision de monde. Nous devons placer l’océan au cœur de nos préoccupations quotidiennes. Il est illusoire de croire que l’on pourra continuer à parler de durabilité de la planète sans prendre en compte le paramètre océan Mais nous devons aussi construire un nouveau modèle socio-économique mondial intégrant l’océan, de manière responsable et durable. Comme source principale d’innovation et de solutions pour la planète. Comme une valeur de progrès. Certains appellent cela la Blue Society. Ce qui est sûr c’est qu’il s’agit d’un modèle incontournable pour accompagner la planète vers un futur désirable. C’est d’un véritable changement de paradigme qu’il s’agit. Un changement de paradigme aux couleurs de l’océan.

Et pour réussir cet ambitieux pari sur le futur, si l’on veut que l’océan vive dans le cœur des hommes, alors il faut faire vivre les hommes au cœur de l’océan.

La planète est en crise

La planète est en crise, ce n’est plus un secret pour personne.

De par le monde, de nombreuses voix s’élèvent pour dire que l’avenir de l’humanité se joue au cœur des océans. Et tout comme la vie  y est certainement apparu il y a 3,5 milliards d’années, le destin de nos civilisations se joue aujourd’hui dans les profondeurs abyssales de notre planète.

Pour autant, si elle est aujourd’hui plus répandue, cette vision n’est pas entièrement neuve. Et depuis que l’homme a mis la tête sous l’eau, pour ce qui est des prémisses depuis l’antiquité mais en réalité de manière industrielle et professionnelle depuis 300 ans, il s’est peu à peu forgé une nouvelle vision du monde sous-marin et des abysses. Et l’homme s’est mis à « habiter la mer » c’est-à-dire à coloniser de plus en plus fréquemment et de plus en plus profondément le milieu marin et ses fonds de moins en moins insondables. Dans la veine de Jules Verne et de son Nautilus, les premiers pionniers et inventeurs de systèmes alambiqués et de machines folles ont ouvert la voie à la pénétration de l’homme sous la mer par la voie du scaphandre et du sous-marin ou de ses corollaires – sphères, tourelles et autres systèmes plus ou moins sophistiqués… Les contraintes techniques résolues et les limites repoussées, notamment par Cousteau et ses mousquemers inventeurs de la plongée moderne, l’exploration a pu commencer pour apporter son lot de découvertes scientifiques et de publications académiques à propos d’un nouvel univers qui s’ouvrait aux sphères de la connaissance et du savoir. La Calypso ouvrant la voie vers le monde des béotiens, bientôt renforcée par la soucoupe plongeante, les systèmes et les machines se perfectionnant, le phénomène s’accéléra ouvrant la voie à de nombreuses sciences marines, qui pour n’être pour la plupart que bicentenaires n’en ont pas moins ouvert des champs de recherches et de découvertes remarquablement diversifiés et hautement déterminants pour la compréhension du monde vivant comme du monde physique. Mais l’impérieuse nécessité de rester toujours plus longtemps sous l’eau a peu à peu fait son chemin et le concept de maison sous-marine est né de cette envie de l’homme de s’inscrire plus durablement dans cet univers qui lui tendait désormais les bras. Cousteau, encore lui, fut le premier à sauter le pas et à installer un véritable  habitat sur le sol marin. Une vraie révolution. Non pas tant technologique car l’exploit demeure du domaine de l’expérimental mais bien spirituel et philosophique : l’homme a enfin reconquis son milieu originel où il peut désormais séjourner les yeux ouverts sur ce monde sous-marin qui l’entoure et l’accueille avec bienveillance. Une étape qui marque la génération qui s’éveille dans le sillage de l’homme au bonnet rouge. Habiter la mer n’est plus une utopie. Jacques Rougerie – qui fait partie de ceux-là – en est convaincu. Il sera architecte du monde sous-marin créant des villages sous la mer, réalisant et expérimentant ses propres maisons sous-marines, ses propres vaisseaux innovants. Avec toujours la même obsession : donner à voir à ceux qui peuvent désormais habiter cet océan qu’il met à leur portée par le concept architectural et l’ingénierie innovante mais aussi par le dialogue qu’il sait établir à travers ces grands yeux qui caractérisent ses créations et qui tissent peu à peu sa propre légende. 35 ans plus tard, SeaOrbiter héritier de ses créations et réalisations est le nouveau navire amiral de Jacques Rougerie, prêt à tracer un nouveau sillon dans le bleu de l’océan. A ouvrir une nouvelle voie. Pour la science mais aussi pour l’éducation à ce monde qui mérite plus que jamais notre attention. Pour tisser de nouveaux liens et définir de nouveaux rapports entre l’homme et l’océan.

« H²O : hills to ocean comme disent les anglosaxons,
des hauteurs à l’océan en français, tout va à l’océan.
Tout finit à l’océan. »

Car en même temps que la conquête technologique des abysses, l’homme a procédé à une conquête intellectuelle du milieu sous-marin. Jules Verne fut sans doute le premier à apporter un éclairage nouveau – certes très romancé – sur ce dernier. Son roman 20 000 lieues sous les mers a sans aucun doute été le premier catalyseur d’une communauté qui s’ouvrait par ailleurs aux prémices de l’océanographie. Cette communauté littéraire – la communauté des Meriens – regroupée derrière la symbolique du Nautilus a créé une première vague d’intérêt, de passion pour l’océan. Puis vint Cousteau. Changement d’époque, de moyens, de médias, d’échelle. Cousteau a ouvert la porte du monde du silence par l’entremise de la plongée en scaphandre – qui permettait dès lors de s’immerger dans le monde sous-marin de manière plus aisée – et par le prisme de la télévision qui lui a offert une audience – puis une tribune – planétaire. La communauté des Meriens a grossi, bercée au rythme des aventures de la Calypso et de l’épopée Cousteau sur toutes les mers du monde. Une œuvre de sensibilisation universelle qui a fait du Captain Planet l’un des hommes les plus célèbres de la deuxième moitié du 20e siècle et le héros de la véritable découverte moderne du monde sous-marin. Avec une cible privilégiée, cette fameuse « génération future » dont Cousteau avait pressenti l’importance dans le protocole de gestion d’une planète qui donnait ses premiers signes de faiblesse environnementale. Aujourd’hui la génération Cousteau a grandi mais elle conserve au fond de son inconscient devenu collectif cet écran bleuté qui a guidé ses pas, ses vocations, dans le souvenir puissant des aventures de la Calypso. Elle nous a menés vers une autre vision du monde vers une autre conception de nos responsabilités vis-à-vis du monde sous-marin, de l’océan, de la planète. Mais il reste encore beaucoup de travail à accomplir sur ce chemin et de nombreux héritiers de Jules Verne et de Cousteau ont repris le flambeau. Et ils ont leur porte drapeau.  Autres temps, autre vaisseau : c’est désormais SeaOrbiter qui porte les espoirs et les ambitions des Meriens des temps modernes. Son créateur, Jacques Rougerie est bien l’héritier de cette lignée de visionnaires marins qu’étaient Jules Verne et Cousteau. Le Merien étant bien aujourd’hui celui qui, habitant proche ou lointain du rivage, a compris que ses actes quotidiens avaient un impact direct sur le milieu marin et que l’océan était bien le moteur global de la planète, le garant de ses équilibres et du destin des civilisations qu’elle porte. SeaOrbiter, ambassadeur de la sensibilisation environnementale planétaire aux couleurs de l’océan prend aussi appui sur les nouveaux médias numériques et le monde magique d’Internet. Un nouveau saut quantique dans notre capacité à sensibiliser la planète mer et à diffuser du contenu éducatif au bénéfice des océans afin de provoquer la troisième expansion de la communauté des Meriens.

Qui sont les Meriens d’aujourd’hui ? Ce sont tous ceux qui ont compris que l’océan est au cœur du système planétaire et que chacun de nos actes a un impact sur lui. Et pas besoin d’habiter au bord de la mer pour cela. Bien au contraire. Le Merien habite les villes, les plaines, les vallées, les montagnes. H²O hills to ocean comme disent les anglosaxons, des hauteurs à l’océan en français, tout va à l’océan. Tout finit à l’océan. ET tout y commence. Il faut y être sensibilisé, éduqué, alerté. De notre capacité à réussir ce pari dépend notre capacité à convaincre. Pour un meilleur engagement des plus jeunes envers les enjeux planétaires à venir d’où l’océan ne peut plus être tenu à l’écart. L’intégration de la thématique « océan » dans les sommets internationaux sur le développement durable a aujourd’hui valeur de symbole. C’est aussi un fait irréversible. Depuis Copenhague et après Rio + 20 et la COP21 de Paris, les « Journées de l’océan » ont fait la démonstration qu’il est illusoire de croire que l’on pourra traiter des problèmes de durabilité de la planète sans prendre en considération les multiples enjeux liés à l’océan. La nouvelle responsabilité sociétale que la gestion planétaire à venir réclame sera aux couleurs de l’océan ou ne sera pas. Pour des problèmes d’équilibres écologiques mais aussi pour des solutions d’avenir dont les océans, tous les scientifiques du monde s’accordent à le dire, regorgent. Que ce soit dans les domaines de la santé, de l’alimentation, de la pharmacologie, de l’industrie, de l’énergie… les biotechnologies et les ressources issues du domaine marin sont une source encore très largement inexplorée – inexploitée– de richesses qui conditionneront le futur de l’humanité. Reste à inventer un modèle qui permettra une utilisation raisonnée de ces richesses. C’est l’un des engagements de la future Blue Society et des personnes qui, regroupées autour du projet SeaOrbiter et d’organisations telles que le l’Alliance pour les mers et les océans, le World Ocean Network, Nausicaa, Green Cross, Sea for Society ou Tara Expeditions, aident à construire ce nouveau modèle socio-économique mondial fondé sur une gestion écosystémique d’une planète ayant intégré, de manière responsable et durable, l’océan comme moteur pour sa survie et comme source principale d’innovation et de solutions pour le futur.

Une rupture prospective et visionnaire, voilà ce que propose la Blue Society par rapport, notamment, à la green economy . Il s’agit de modifier de manière drastique  notre vision sociétale, et cela à l’échelle internationale, pour accompagner la planète vers un futur désirable, une véritable révolution sociétale – et non un simple changement vers une industrie plus écologique – pour sortir de la crise écosystémique qui caractérise notre dérive planétaire actuelle. Plus que du temps de Jules Verne ou de Cousteau, c’est d’un véritable changement de paradigme qu’il s’agit. Un changement de paradigme aux couleurs de l’océan.

NEEMO 9 – Floride – USA – 2009

Dans le cadre du développement du projet SeaOrbiter, Ariel Fuchs a participé avec Jacques Rougerie au programme NEEMO, programme d’entrainement des astronautes de la NASA et autres agences spatiales internationales à l’intérieur de l’habitat sous-marin Aquarius, immergé à moins 15 m au large des côtes de Key Largo, Floride, USA.

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